Désormais et depuis quelques années, le mois du Ramadhan est devenu une aubaine inespérée pour les vendeurs à la sauvette qui foisonnent sur toutes les places ou espaces vides de nos villes et villages.
Cette nouvelle corporation de commerçants sans papiers et sans domiciliation, opère pourtant au vu et au su de tout le monde en mettant à profit l’opportunité du mois sacré pour écouler une marchandise de pacotille et de qualité souvent douteuse. Pis encore! A chaque année, le nombre de ces businessmans s’accroit pour couvrir toutes les activités: alimentation générale, habillement, articles scolaires et de sports, orfèvrerie.
Serait-ce une fatalité? Ainsi, à chaque événement religieux, national ou autre, ces vendeurs s’implantent davantage sur la voie publique. Des denrées alimentaires sont exposées dans des conditions suspectes, ainsi que des effets vestimentaires et des articles scolaires qui ont envahi de nombreux quartiers, trottoirs et places publiques. Face à l’assaut de ces trabendistes et autres vendeurs à la sauvette.
Des commerçants lassés par l’ampleur du phénomène et l’impuissance des services de contrôle, se lamentent sans cesse: «C’est nous qui payons le loyer, la sécurité sociale, les impôts et les taxes alors que d’autres se remplissent les poches, en toute quiétude, sur les trottoirs». Ceci est vrai, le commerce informel, qui a déjà sur la rue depuis belle lurette, prend toujours de l’ampleur en se propageant à une vitesse vertigineuse durant cette période de double rentrée, sociale et scolaire, précédée du mois sacré du Ramadhan, une période où la consommation des ménages en tout va crescendo. Ce phénomène, tenace, ne semble pas reculer, en dépit des mesures prises par les pouvoirs publics, qui sonnent comme un prêche dans le désert. Pour preuve, où que vous alliez, de Z’malet El Emir Aek en passant par Ksar-Chellala, Hamadia et Mahdia jusqu’à Tiaret, Frenda, Aïn Dheb ou Sougueur, d’Est en Ouest et du Sud au Nord de la wilaya, voire du pays, ces vendeurs à la sauvette, jeunes et moins jeunes, tous sexes confondus ont littéralement pris d’assaut les différents marchés et espaces publics des centres urbains, avec tous les préjudices que cela porte au commerce légal et à l’économie nationale. Un véritable bazar ambulant, où l’on trouve de tout, se construit illicitement dans nos villes. Une virée dans plusieurs marchés de la wilaya permet de constater que le fléau du commerce informel ratisse large, au grand désarroi des commerçants qui exercent dans la légalité.
Du marchand de poissons au vendeur de «dioul», en passant par les autres trabendistes qui étalent, à même le sol, des produits pourtant périssables: fromages, cachère, tablettes de chocolat, gaufrettes fourrées, sachets de lait, yaourts… jusqu’au costume «3 pièces» et autres vêtements féminins et masculins de luxe. Ces pratiques devenues monnaie courante, se font, bien sûr, au détriment de l’hygiène et de la santé du citoyen consommateur qui, impuissant, se contente d’observer la scène. D’autre part, ces vendeurs téméraires exposent les mêmes produits que ceux vendus dans les magasins, mais, chose étonnante, à des prix relativement moins chers, à croire qu’ils sont ravitaillés par de grandes usines de production locales au moment où tous les produits sont d’une marque étrangère!
En certains lieux comme Tiaret, Sougueur ou Frenda et selon de nombreux commerçants, «ces trabendistes ont été chassés par la police, mais après une brève accalmie, ils reviennent à chaque fois en force à tel point qu’ils ont squatté les trottoirs, au vu et au su de tout le monde». Il confie, en outre, que «ces vendeurs qui ne paient ni les impôts, ni le loyer, proposent des produits, à bas prix mais de mauvaise qualité, parfois périmés».
Le gérant d’un magasin d’habillement ajoute qu’il s’agit d’un fléau qui a pris de l’ampleur en pénalisant gravement le commerce légal. «Nous comprenons parfaitement la situation de ces jeunes qui, faute d’emploi, recourent à ce genre d’activité, mais l’Etat doit leur trouver une solution en régulant leur activité pour qu’ils puissent exercer dans la légalité», a-t-il suggéré.
Cette concurrence déloyale est difficile à admettre pour certains. Du côté des trabendistes qui sont généralement tous issus de familles démunies, ils viennent d’horizons divers: victimes de la déperdition scolaires, collégiens ou lycéens et universitaires.
Tous sont unanimes pour dire qu’ils gagnent leur pain quotidien. A Mahdia, un jeune vendeur d’articles scolaires, installé devant le marché central nous déclare que pour eux aussi, la vie n’est pas facile: «Les meilleures sont occupées par les anciens et chacun a son «territoire», délimité. Il n’est pas question d’empiéter dessus». Puis tout en reconnaissant que cette activité est illégale, il nous confie: «C’est grâce à ce commerce que je fais vivre ma petite famille de quatre personnes, mon père est chômeur lui aussi». Enfin, dans une telle situation, l’on ne peut que lancer un appel aux autorités publiques qui peuvent aider ces jeunes et moins jeunes à activer dans la légalité et respecter ainsi les lois de la République. S. Moumen
18 septembre 2010
S.Moumen