Edition du Dimanche 05 Septembre 2010
L’Algérie profonde
: Mustapha mohammedi
Elle
est née avant la “Hamoud”, bien avant, je ne sais pas quand mais je la
soupçonne d’avoir été mise au point un jour de grande chaleur, de
sirocco, quelque part sous les murs de Gharnata. C’est vous
dire qu’elle n’a pas toujours été la boisson des humbles. Elle a d’abord
été celle des princes et a probablement vu le jour dans les cuisines
feutrées de la cour. Breuvage des pauvres et des zaoualis, la “cherbet”
est un peu la Wolkswagen des écuries de course. Elle roule à son
rythme, sans se soucier de désign et de performance, l’important est de
rafraîchir les gosiers. Elle est indémodable. Et en plus, simple et
rapide à préparer et ne nécessite ni colorants ni ingrédients
particuliers et encore moins de contrôle à la pasteurisation. La
recette tient en trois mots : de l’eau plate, une rondelle de citron et
un zeste de sucre cristallisé et le tour est joué. Au point qu’il existe
aujourd’hui autant de variétés de cherbet qu’il ya de foyers. Une
famille ajoute un arôme, une autre un peu d’orange, une troisième du
“mazhar” et ainsi de suite jusqu’à ce que chaque mixture constitue
presque un ADN en matière de gazouze capable de distinguer un gourbi
d’un autre. Avec ce mois sacré du jeûne et bien sûr l’attrait
irrésistible du gain, des mômes dans les villages de la côte ont appris
après le “matlouh” à vendre aussi des cherbet maison. La pratique est
nouvelle. Elles sont de toutes les couleurs, ces limonades, après leur
mise en bouteille dans les haouchs et sont disposées bien en vue sur des
tables en bois pour attirer les regards gourmands des passants. Il
n’y a ni secret, ni alcôve. Un jour, ces familles qui ont perdu leur
âme vendront peut-être des boîtes de “hrira” !
M. M.
25 septembre 2010
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