Détournement du FNRDA à Tissemsilt Le procès en appel

le 14.10.10 | 03h00

Décidemment, les dossiers dits du fonds national de régulation du développement agricole (FNRDA) ne sont pas prêts de se refermer, en dépit des procès en cascade intentés par la justice sur le devenir de plus de 400 milliards de centimes dans la wilaya de Tissemsilt.

Deux des quatre procès, ficelés en 2008 par la cour de justice de Tiaret qui englobe la wilaya de Tissemsilt, ont été rouverts cette semaine. Ouverture décidée après les appels introduits auprès de la cour suprême par certaines victimes et autres accusés d’un dossier qui n’a pas livré tous ses secrets. Il est un peu tôt pour récapituler les dessous de ces scabreuses affaires de détournements tant les verdicts concernant deux d’entre elles seront prononcés la semaine prochaine. Avant-hier, au deuxième jour du procès concernant 97 accusés, dont sept emprisonnés, il a été loisible quand même de s’imprégner, relativement, de la donne. Alors qu’ils défilaient devant la barre, les prévenus donnaient presque tous l’impression de relire un scénario qui a fini par lasser tout le monde. Même l’imperturbable président, M.Zerouali n’a pas cessé de maugréer, et de s’énerver de voir se répéter la même phrase «wallah j’ai été servi, M. le président !».

Tout d’un coup le ton changea. Un vieux quidam avance et comme pour faire contraste avec ses pairs fellahs «annonce avoir été floué par cet entrepreneur assis dans le box des accusés, une bouteille d’oxygène dans la main». Lui c’est «l’Algérois dont on a beaucoup parlé». C’est le «Dziri» qui a fait fortune dans la région grâce à des complicités. «Tisvert» et «SARL Brahimi» ont été parmi les entreprises des plus citées. Le jeune ne désarme pas devant la confrontation. Il a réussi, dit-on, à «s’accaparer la quasi-totalité des projets dans la wilaya de Tissemsilt». Lors du procès, il a réussi la gageure de se distinguer et de ravir la vedette en se baladant avec une bouteille d’oxygène vidée.

En sa compagnie, des subdivisionnaires et un ex-directeur des services agricoles, venus en témoins,  puisque la cour suprême a jugé irrecevable leur pourvoi en cassation. On l’a vite compris il s’agit d’un de ses cas de figure qui a fait scandale. L’entrepreneur, qui devait équiper les exploitations selon un cahier des charges préétabli, ne s’acquitte pas de la tâche mais une fois en possession de l’attestation de service, grâce à des complicités, encaisse la facture, trop souvent à l’insu de l’agriculteur et le tour est joué. Entre-temps, la subdivision de l’hydraulique ou celle des services agricoles devaient s’assurer de la réalisation effective du projet. Ce n’est pas souvent le cas face à la cupidité et à la voracité des uns et à l’ignorance des autres.

Un mode opératoire est trouvé. Sur le papier, le projet est réalisé mais sur le terrain les gendarmes ne découvrent rien. L’affaire éclate. Pour celle en cours, plus de 29 milliards ont été dilapidés dans les dédales sinueux d’un deal bien orchestré. Fellahs, employés et entrepreneurs sont embarqués dans une galère à nulle autre pareille et l’agriculteur, le vrai, est ruiné. Certains, à l’exemple d’une nonagénaire, a apposé sans le savoir son empreinte au bas d’un document et v’lan pour son projet agricole. Un autre appelé à la barre n’est plus de ce monde. Me Mahmoudi qui représente ces laissés-pour-compte a exigé en sa qualité d’avocate de la partie civile des dommages et intérêts égaux aux sommes détournées pour chacun des projets suscités. 

Fawzi Amellal

 

 

© El Watan