le 09.07.11 | 01h00
Labours illicites, conflits récurrents entre éleveurs, destruction de pistes sur de vastes espaces steppiques… A Aïn Deheb, localité agropastorale située à 60 km de Tiaret, les démons du tribalisme sont de retour.
Si les conflits tribaux ne datent pas d’hier à Aïn Deheb, ils sont toutefois favorisés par les luttes incessantes pour l’accaparement des terres de parcours.
A Laâlibet (25 km au sud de Aïn Deheb), une bagarre — aux apparences anodines — éclate entre deux jeunes bergers en ce dimanche 15 mai. L’un, issu de arch (tribu) des Ouled Moumen, de la wilaya d’El Bayadh, l’autre d’El H’fais, fraction de arch Ouled Sidi Kada Belmokhtar, originaire de Mascara.
La raison ?
L’occupation des zones de pacage qui sont livrées littéralement à la convoitise insatiable des éleveurs.
Trois jours après, les sages des deux tribus se retrouvent au marché hebdomadaire et tentent le traditionnel «solh» (réconciliation)… en vain. Les hostilités reprennent de plus belle. On se bat alors jusqu’au sang, à coups de gourdins, de blocs de pierres et de poings, sous les yeux médusés d’une foule compacte.Des membres de la tribu des Chaouïa, se réclamant être «authentiquement de la région de Tiaret», s’en mêlent et prennent fait et cause pour El H’fais.
Bilan : sept blessés, un véhicule saccagé et une avalanche de plaintes chez les gendarmes.
Vendetta
La situation aurait pu s’arrêter là si les Chaouïa n’avaient pas crié vengeance. Le lendemain, une trentaine de personnes armées de gourdins débarquent chez les Belgerchi, éleveurs de la tribu des Ouled Moumen. L’affrontement n’aura pas lieu au camp des Belgherchi, situé dans le périmètre mis en défens de Meksem Lahlayes. «Le pire a été évité de justesse ce jour-là, où sous les tentes ne se trouvaient que les femmes et les enfants. Ce genre d’expédition s’achève en général dans un bain de sang», déplore Meradji. En repartant, les assaillants laissent cependant un message clair et qui a valeur d’ultimatum: «Vous allez quitter les lieux, et le plus tôt sera le mieux.»
Depuis cette descente manquée, bergers et éleveurs sont sur le qui-vive, appréhendant la moindre rixe. Fin mai, des représentants des tribus d’El Bayadh et de Tiaret se rencontrent à Aïn Deheb. Trois cents personnes sont conviées à un méga-méchoui et parlent de réconciliation.
La tension baisse d’un cran, mais le différend demeure. «De hauts responsables ont tout fait pour que les chefs de tribu se mettent autour d’une même table», dira Meradji. Ici, on se souvient toujours de cette bagarre rangée et sanglante qui, pour des vétilles, a éclaté en 1968 en plein cœur de la ville de Tiaret entre les Beni Mediéne et les Kraich. A l’époque, il a fallu l’intervention de Kaïd Ahmed, dit Commandant Slimane, pour faire cesser les hostilités entre ces deux tribus rivales. .
Mammeri Abdelkrim
© El Watan
9 juillet 2011
AGRICULTURE, AIN DEHEB