Combien sont-elles ces femmes et ces jeunes filles, parfois mères, ces parias de la société, si on peut se permettre de les appeler ainsi, dont les problèmes demeurent terre à terre ? Une interrogation à laquelle ont répondu des spécialistes en la matière lors d’une conférence-débat abritée samedi dernier par l’hôtel Tagdempt et initiée par la cellule psychosociale de la Fondation nationale pour la promotion de la santé et le développement de la recherche (FOREM).
«La réponse aux violences subies par les femmes se trouve exclusivement dans la rue tant les services habilités à livrer des statistiques, à Tiaret ou ailleurs, continuent à considérer indifféremment ce sujet comme tabou. Malencontreusement, il est de ces tabous qui se retournent contre ceux-là même qui excluent la nécessité d’en parler », dira d’emblée Mme Gahar, professeur à l’Université de Bab Ezzouar. Certes, cette catégorie, comme tant d’autres d’ailleurs, relève d’une raison sociale insoutenable dans notre culture arabo-musulmane, mais le phénomène existe et ne connaît pas de cambrure. Dès lors, autant prendre les choses avec justesse et regarder la vérité en face quand on sait que le chômage, la condition dramatique de la femme rurale, l’exode rural, l’analphabétisme et… la misère ont malheureusement eu raison du peu de chasteté de ces êtres pour lesquels la décadence sociale, voire le malvivre qui ne cesse de s’exprimer de diverses façons, a anéanti les bons sentiments et les idéaux. « Écartées par leurs proches et impitoyablement montrées du doigt par une société cruelle, ces filles, généralement retirées de l’école, exploitées, battues et incitées à la débauche, cultivent en secret, au plus profond de leur âme meurtrie, l’unique rêve de retrouver leur vie normale et retourner auprès des leurs », ajoutera cette dernière qui n’a pas été sans préciser que le droit ne se donne pas mais s’arrache. Parlant des droits de la femme, l’intervenante soulignera la nécessité de la réhabiliter avec son milieu social en prenant compte de certains critères indissociables, à savoir, la sous-humanité juridique de la femme sous différentes formes, l’attitude désorientée et le faible accompagnement des autorités publiques à prendre en charge les femmes violentées du fait des abus sexuels de harcèlement moral et agressions conjugales, l’élargissement des catégories des femmes en difficulté livrées à elles-même, les mères, les handicapées, les femmes violées, les mères célibataires, la femmes sans ressources livrées à toutes les formes d’exploitation et d’asservissement ainsi que la féminisation de la pauvreté en Algérie qui accentue la violation des droits humains dont la première victime est la femme. Dans le même contexte, cette dernière a mis l’accent sur la violence conjugale qui se veut un problème incommode que l’on tente trop souvent de voiler. « Aujourd’hui, beaucoup de femmes subissent, supportent, vivent le contrôle et l’autorité de leurs époux. La violence conjugale n’est pas le propre des milieux défavorisés. On évoque souvent des chômeurs maltraitant leurs femmes pour des problèmes financiers. Ou bien des alcooliques faisant vivre la terreur à leurs conjointes ». En effet, souvent mis à l’index, le chômage et l’alcoolisme sont considérés comme étant les principaux facteurs de violence. S’agissant des ménages aisés ou les époux de hautes professions, on estime généralement que le problème conjugal est souvent lié à l’infidélité dans le couple comme il peut également être lié à l’incompatibilité de niveau intellectuel. « Le chiffre noir de la violence conjugale est en hausse et les témoignages se succèdent et se ressemblent. Mais, beaucoup de victimes souffrent en silence et n’osent ni porter plainte ni dénoncer », avait conclu Mme Gahar. De son côté, la psychologue de la Gendarmerie nationale a préféré mettre en exergue la tactique de cette institution pour la protection de la femme. D’emblée, elle déclare que la Gendarmerie nationale a enregistré 1 490 femmes violentées en 2009, 1 375 en 2010 et 441 durant les quatre premiers mois de l’année en cours. « Le volet relatif aux violences contre les femmes est, actuellement, l’une des préoccupations de la Gendarmerie nationale, mais la plupart des femmes battues ou séquestrées ne le déclarent pas et s’enferment dans un mutisme fataliste », affirmera-t-elle. Et d’enchaîner : « Outre les violences conjugales, les femmes sont perpétuellement confrontées à un autre aléa qu’est le harcèlement sexuel ou moral ». De tels délits qui frappent la majorité des secteurs publics et privés, engendrent des pratiques despotiques de l’employeur ou des supérieurs hiérarchiques dans l’impunité et à l’abri de toute poursuite à cause du silence des victimes. Un silence somme toute gardé pour parer à des représailles sur le lieu de travail. Bien des femmes préfèrent vivre silencieusement le calvaire que d’aller dénoncer leurs bourreaux dans la mesure où il est vraiment difficile de fournir des preuves, dans le cas de harcèlement sexuel, aux agents enquêteurs ou au magistrat compétent. Par ailleurs, elle suggère aux femmes battues, agressées ou violées de ne plus cautionner la loi du silence en se présentant aux services compétents afin de mettre un terme à ces pratiques malsaines qui vont à l’encontre de la femme et des droits humains. M. Zouaoui
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Lundi 23 mai 2011 – www.lecourrier-dalgerie.com – N°2195 – 8e année
29 juillet 2011
ASSOCIATION, M. Zouaoui