ls étaient quelques milliers d’étudiants à paralyser la capitale dans la journée d’hier et à briser un impressionnant dispositif sécuritaire. Ils ont marché de la Grande Poste à la Présidence et se sont révoltés contre la réalité amère de l’université algérienne.
Comme première action du genre, les étudiants protestants ont obtenu satisfaction après avoir brisé le tabou de marcher dans la capitale. C’est une belle réussite pour les milliers d’étudiants ayant répondu à l’appel à la marche de la Coordination nationale autonome des étudiants. Mobilisés, unis, solidaires et surtout déterminés, plus de 20 000 étudiants des universités de plusieurs wilayas : Alger, Béjaïa, Bouira, Blida, Boumerdès, Constantine, Mostaganem, Oran, Tiaret… ont marché dans la journée d’hier, partant sans recul de la placette de la Grande Poste jusqu’à proximité de la présidence de la République. En dépit d’un dispositif sécuritaire renforcé mis en place dans la totalité des rues et avenues de la capitale, Alger- centre notamment, les étudiants étaient résolus à aller jusqu’au bout pour «une université libre et démocratique». En matière de planning de la marche établi par la CNAE, les étudiants ont introduit quelques petits changements, le point d’arrivée étant le Palais du gouvernement non pas la Présidence. La marche devait par ailleurs débuter à 11h00, ce qui n’était pas le cas, puisque les affrontements entre la police et les étudiants ont commencé vers 10h00. Vers 10h30, les étudiants percent le premier barrage sécuritaire, puis deux autres placés à la Grande Poste. Ainsi, les pas d’étudiants menant vers la fac centrale, place Audin, sont les premiers à concrétiser la levée de l’état d’urgence dans la capitale, puisque ils ont été les premiers et les seuls à avoir marché après de nombreuses tentatives de marches organisées, mais qui ont échoué.
Empêchés une autre fois par le dispositif sécuritaire mis en face de la fac centrale (place Audin), les étudiants profitent de cet arrêt pour appeler ceux de cette faculté à rejoindre la foule et plusieurs ont répondu à l’appel en plus de ceux descendus des bus universitaires coincés dans la rue. Les étudiants organisateurs ayant pris les devants de la foule répétaient à chaque fois aux policiers qu’ils veulent faire une marche pacifique, qu’ils sont des étudiants non des voyous. Les policiers de leur côté font la sourde oreille, et assiègent les étudiants. Ces derniers obligés de foncer sur les barrages ont reçu plusieurs coups de matraque. Ils sont vers 11h15 plus nombreux à prendre le boulevard Mohamed V vers Télémly. En route, les étudiants scandaient des slogans tels que : «1.2.3 où va l’université», «Harraoubia dehors», «Vive la lutte car seule la lutte gagne», «On est toujours des révolutionnaires», «Halte à la répression des étudiants»… arrivant au Télémly, les étudiants changent de direction, au lieu d’aller vers le Palais du gouvernement, ils décident de se rendre à la Présidence. Tout en s’avançant, ils demandent aux femmes qui suivaient le mouvement des balcons de leur jeter de l’eau, les étudiants en reçoivent et avancent vers la Présidence tout en paralysant la circulation. De nouveau, les étudiants protestataires sont bloqués par un cordon de sécurité au niveau du boulevard Souidani Boudjemâa. Quelques étudiants ont été blessés. Les policiers résistent vainement, et la marche se poursuit. Un autre cordon sécuritaire les attendait, à proximité de l’hôtel El Djazaïr (ex-Saint-Georges) mais qui sera aussi brisé suite à de violents affrontements avec les forces de l’ordre. Arrivés à l’avenue de Pékin, près du Palais d’El Mouradia, les étudiants n’ont pu casser le dispositif sécuritaire qu’après de multiples tentatives. Et la barrière sécuritaire fut brisée puisque le palais de la Présidence était assiégé par les forces de l’ordre qui ont empêché les étudiants de progresser vers la Présidence. Rassemblés sur place, les étudiants ont continué quand même à scander des slogans hostiles au pouvoir. Dans cette action, les étudiants adressent un message au président de la République. Ils se révoltent contre la dégradation de la qualité de la formation, la création et la généralisation tous azimuts de nouvelles formations, en l’absence d’une cohérence et d’une uniformisation par rapport aux standards universels, ainsi que le manque de communication entre la tutelle et la famille universitaire. «Libérez la science, la science fera le reste», tel est l’appel de plus de 20 000 étudiants qui ont exprimé leurs inquiétudes quant à l’avenir de l’université algérienne.
Par Yasmine Ayadi
Source:Le Jour d’Algérie
8 août 2011
ENSEIGNEMENT