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Oued Lili, à quelques encablures de Tiaret.

27 janvier 2012

HISTOIRE, Oued Lili


 Il faut crapahuter jusqu’au djebel en ces hauts-plateaux de l’Ouest où la rigueur hivernale fouette les visages pour parvenir, enfin, après cinq bons kilomètres à pied à se retrouver nez à nez avec la fameuse grotte qui servait de cache à Feu Adda Hamdani et ses valeureux compagnons d’armes. Et puis, ce grand moment d’émotion qui gomme, de suite, toute fatigue. Avant que les photographes ne mitraillent ce lieu-dit et le fixent pour la postérité. Même si les héros ne meurent jamais…
Tout a commencé par une chorale enfantine. Histoire de se préparer à entrer dans l’histoire par la porte symbolique du chant. Pas n’importe quel chant qui plus est puisque signé patriotique. Et pas de n’importe quel auteur puisqu’il s’agit de Moufdi Zakaria à qui on doit tout simplement le sublime hymne national. Et dans la salle « Mustapha Mekki » règne un silence religieux. «Anta ya Omar» est entonné par une chorale mixte, sous les applaudissements nourris d’une assistance essentiellement juvénile et ma foi plutôt bruyante. A tout seigneur tout honneur, aux premières loges, de valeureux moudjahidine toujours bon pied bon œil malgré le poids des ans ou les injures du temps dont certains témoigneront tantôt es qualité, de feu Adda Hamdani, valeureux chahid tombé au champ d’honneur juste à la veille de l’Indépendance et dont le moins qu’on puisse dire est qu’il aura donné bien du fil à retordre à la puissance occupante. Qui a dû employer le pire des subterfuges, la fameuse infiltration ou bleuïte pour lui mettre le grapin dessus; le condamner à mort et l’éxécuter avant d’enfouir son corps quelque part en un recoin jusque-là encore inconnu. Ce qui a fait dire à une autorité présente sur place qu’il est de notre devoir de lui ériger une stèle commémorative tout près de la grotte, ou ghar, où il s’était terré avec ses compagnons d’armes. Faut-il alors déplorer que, cinquante ans après l’indépendance, les services compétents n’aient pas encore déniché ou identifié le lieu de son enterrement ou en vouloir davantage à l’ex-puissance coloniale de ne pas avoir fourni à notre pays les informations nécessaires à même de localiser la tombe de cet authentique héros ? En tout cas, cela vérifie amplement l’adage selon lequel l’histoire reste toujours un éternel recommencement… Raison de plus pour relancer le débat sur cette complexe et épineuse problématique de l’histoire qui n’a pas encore obtenu le statut qu’elle mérite si l’on ose dire. Maintenant et pour la petite histoire, comment admettre que les autorités locales n’aient pas daigné ouvrir ce musée si controversé, à en croire les différents sons de cloche répercutés publiquement ça et là, et dont la construction a coûté au trésor public. On estime aujourd’hui à quelque chose comme 4 milliards de dinars le montant nécessaire à sa restauration. Et comme le devoir de mémoire n’a pas de prix, tout autant que la conservation de la mémoire collective, gageons donc que les autorités réagiront positivement en dégageant l’enveloppe financière adéquate à ce haut-lieu de l’histoire majuscule. Car, que peuvent bien représenter ces quelques milliards par rapport au sacrifice suprême de tous nos aînés et sans doute parmi les tout meilleurs d’entre tous. Heureux donc tous ceux qui sont morts pour la terre charnelle. Et dans la succession de témoignages descriptifs et poignants, il y a lieu de relever, nonobstant des absences de marque, celui de Mimouna, étonnante de fraîcheur… Pour elle, il est hors de question de «nourrir la culture de l’oubli» ou de «passer l’éponge» sous le prétexte fallacieux que «le temps finira par panser et guérir toutes les blessures». Car les blessures de l’âme, elles, sont de celles « ineffables et indélébiles». Cette héroïne aussi fringante qu’une jeune fille et d’une spontanéité qui déteint bigrement avec les partisans «d’euphémismes douteux» aura été incontestablement celle qui «parle avec cœur et passion», se fichant royalement de quelques reproches émanant d’anciens compagnons au verbe disons «plus mesuré». Brave et admirable, Mimouna qui sait dire les choses avec les mots de tous les jours , avec «ce parler vrai» loin des « canons » classiques du verbiage, phrases stéréotypées et creuses… Ce qui explique qu’elle aura été en cette journée commémorative «la coqueluche des médias». Comment oublier également cette «petite larme» versée par notre confrère Ammar Belkhodja, auteur d’ouvrages «historiques» et non moins journaliste réputé. Or, et ce n’est pas inventer le fil à couper le beurre que de le rappeler au bon souvenir des uns et des autres parmi les apprentis-sorciers : on ne badine pas avec l’histoire, celle écrite en lettres de sang par toute une génération porte-flambeau d’une Révolution qui a enfanté tant de Adda et de Mimouna. Ce Adda dont se revendiquent tous les authentiques patriotes, ce Adda d’extraction populaire comme l’essence et la quintessence de la Révolution, ce Adda enfin qui, même dans la prison surpeuplée d’un quartier populaire d’Oran, n’a eu de cesse de clamer haut et fort à la face de ses juges qu’il ne se reniera jamais car «sûr de son bon droit et de celui de tous ses compagnons de cellule». Prison où s’entassaient, pour mémoire, selon les témoignages authentifiés par les rares survivants, «plus de mille deux cents détenus». Que la présence rassurante de feu Adda galvanisait littéralement. Chevalier sans peur et sans reproches en quelque sorte, feu Adda disposait alors d’un atout privilégié pour l’époque : son bagage intellectuel. Car il était plus que lettré pour un gars de sa génération ce terrible meneur d’hommes, ce leader redouté et redoutable puisque la puissance coloniale appellera à la rescousse nombre d’officiers supérieurs dont le maréchal Jouhaud aux fins de «rétablir l’ordre», alors qu’en vérité seule la peau de Adda l’intéressait. La grotte où se cachent Adda et ses compagnons d’armes est alors encerclée.
Et commencent ensuite les «négociations» avec le leader sinon le responsable numéro un de Tiaret connu sous le pseudonyme de Si Othman. Côté état-major français, c’est au colonel le plus gradé Pierre Lecor qu’échoit la responsabilité de ramener à la raison Si Othman, en l’apostrophant en ces termes : «Rends-toi toi et tes hommes et je vous garantis à tous la vie sauve.» Une rafale répondra de suite à ces paroles aux intentions évidentes. Car pas besoin de sortir de Saint-Cyr pour deviner que l’officier français chargé de la basse besogne n’avait qu’une seule et unique obsession : élimininer sinon liquider physiquement… Dans la fusillade qui s’ensuivra, Hassani Miloud, qui partageait le même repaire que Adda, sera blessé tandis que Khelil Abdelkader, bien qu’arrêté, parviendra à fausser compagnie à ses ravisseurs avec les menottes aux mains qui plus est… On le désignera par la suite sous le sobriquet de boussensla, avant qu’il ne soit assassiné… Et pour justifier l’injustifiable, la junte colonialiste dénichera un «sigle» on ne peut plus cynique et significatif : PAM ou en d’autres termes «pris les armes à la main…». De fait, ces hommes n’ouvriront point droit au statut de prisonniers de guerre. Et malgré le collectif des avocats du FLN, constitué notamment par maîtres Oussedik, Abdessemed et Jacques Vergès entre autres sommités du barreau, le juge chargé de l’affaire condamnera Adda à la peine capitale, prononcée le 22-10 1960 et rendue exécutoire le 27 avril 1961 au tribunal d’Oran, après une première parodie de procès, le premier en date du 22 juillet 1960. Qui verra notre héros nullement impressionné rétorquer à ses juges du tribunal militaire : «Vous n’êtes pas compétents pour statuer.» Pendant que les youyous des femmes répondaient à sa bravoure. On doit à la vérité de préciser que feu Adda a abattu un travail de titan en prison, d’où son élection par ses pairs ès qualités de «président du comité directeur des prisonniers». Au jour d’aujourd’hui, personne n’est encore capable de dire avec exactitude où repose le corps de Adda «brûlé à l’essence aux environs d’Oran», rapportent ses compagnons rescapés. Toujours drapés dans leur dignité. Et ce n’est pas la moindre de leurs incommensurables qualités. Mais peut-on être amis de Adda sans avoir ses qualités ?
Amar Zentar

À propos de Artisan de l'ombre

Natif de Sougueur ex Trézel ,du département de Tiaret Algérie Il a suivi ses études dans la même ville et devint instit par contrainte .C’est en voyant des candides dans des classes trop exiguës que sa vocation est née en se vouant pleinement à cette noble fonction corps et âme . Très reconnaissant à ceux qui ont contribué à son épanouissement et qui ne cessera jamais de remémorer :ses parents ,Chikhaoui Fatima Zohra Belasgaa Lakhdar,Benmokhtar Aomar ,Ait Said Yahia ,Ait Mouloud Mouloud ,Ait Rached Larbi ,Mokhtari Aoued Bouasba Djilali … Créa blog sur blog afin de s’échapper à un monde qui désormais ne lui appartient pas où il ne se retrouve guère . Il retrouva vite sa passion dans son monde en miniature apportant tout son savoir pour en faire profiter ses prochains. Tenace ,il continuera à honorer ses amis ,sa ville et toutes les personnes qui ont agi positivement sur lui

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