Par Selim M’SILI
«Un changement en prépare un autre.» Nicolas Machiavel
Chaque jour apporte son lot de mauvaises nouvelles qui amènent leurs parts de réflexion sur les sujets épineux qui se posent à cette société en pleine décomposition. Non, je ne vous parlerai pas de ce tragique accident de bus survenu près de Tiaret et qui a fait la une de la presse nationale. Je sais que des familles seront endeuillées par cet épouvantable drame qui va secouer l’opinion le temps de l’émotion que cela aura suscitée. Je sais qu’une enquête sera diligentée par les services compétents pour essayer de connaître les causes de ce terrible accident: erreur humaine, défaillance mécanique ou rencontre fortuite de plusieurs facteurs. Je suppose que des responsables nationaux ou locaux vont se précipiter au chevet des blessés pour amener un peu de réconfort aux parents, prodiguer les conseils habituels et donner les consignes d’usage pour une prise en charge sérieuse des blessés. Je sais que dans une semaine, on n’en reparlera plus si ce n’est que ce terrible bilan vient encore alourdir des statistiques de la douleur. Je sais aussi que d’ici des élections que beaucoup ont promis de bouder, le prix de la pomme de terre sera le sujet favori des joueurs de dominos et des spécialistes du sandwich-frites. C’est la raison pour laquelle je parlerai encore de l’ambiance de notre morne cité qui a été jadis successivement secouée uniquement par des attentats terroristes et des descentes de forces de sécurité. Dieu merci, il semble qu’il y a dans l’air comme un début de frémissement malgré le ciel de plomb qui s’abat depuis trois jours sur les immeubles décrépits. Ce matin, je rencontre un quidam dont le visage m’est familier: il m’apostrophe tout de go: «Mabrouk! «Ils» ont commencé à faire la route qui mène au marché. Cela fait longtemps que vous vous en plaignez.» J’ai trouvé cela curieux: aurait-il lu mes chroniques ou bien est-ce à force de patauger dans la boue qu’il veut me communiquer sa satisfaction. Mystère! Cela commence à bouger chez nous. Déjà, la semaine dernière, une équipe consistante de jeunes avait été dépêchée par les services de la municipalité pour nettoyer les espaces verts qui bordent l’allée centrale. Cela avait soulevé de nombreux commentaires désabusés du genre: «Il y aura certainement un ponte qui va venir faire un tour de ce côté!
Autrement, on ne voit pas la raison de ce regain soudain d’attention! Nous avons un commissariat, un lycée, un monument aux morts, une bibliothèque qui n’est pas fréquentée, une maison de jeunes, un marché au bout d’une poste boueuse ou poussiéreuse, c’est selon la saison, une poste qui fonctionne comme fonctionne tout le pays, c’est-à-dire avec plus de bas que de hauts… Il n’y a plus rien à inaugurer par ici! A moins qu’«ils» ne préparent le terrain pour les prochaines élections! «Ils» feraient mieux de reconstruire le dispensaire qui a été détruit, il y a quelques années de cela. On ne connaît pas la raison de son démantèlement. Mais il est connu que le département de la santé ne brille pas par sa communication…» Ces bribes de paroles, on peut les entendre partout: aussi bien chez les joueurs de dominos qui sont là parce qu’ils ont compris depuis bien longtemps que les jeux sont faits et que les carottes sont cuites… Du moins pour eux. Par contre, ceux qui n’ont pas l’esprit accaparé par cette éternelle partie qui recommence tous les jours, ne cessent de broder sur le moindre petit évènement qui tire la cité de sa torpeur habituelle. Pas plus tard qu’hier, un important dispositif policier a entrepris de chasser les vendeurs du chemin qui mène au marché et des alentours: les jeunes ont vite fait de ramasser des pneus et de commencer à les brûler sur la route principale.
Les officiers de police ont commencé à dialoguer avec les jeunes. Des explications sont données tandis que des camions de la municipalité embarquent tout le matériel hétéroclite qui sert d’étals aux jeunes vendeurs. Parallèlement, un engin a commencé à creuser la piste boueuse, éventrant ici et là une conduite d’eau tandis que des ouvriers dressent une barricade pour empêcher les véhicules d’accéder au «parking» attenant à la poste et au marché. Cela ira mieux peut-être demain! Qui sait?
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31 mars 2012
ACCIDENTS, Expression (L')