Cela s’est fait durant les années 90. Tuer le multipartisme par trop de partis et tuer la démocratie par l’islamisme. Aujourd’hui, un jeune Algérien du nom de Tarek Mameri peut être emprisonné pour des clips sur Internet appelant au boycott des élections. Il peut être kidnappé par des «civils», embarqué puis remis à un commissariat pour faire «légal». Tout cela on peut le faire, mais des chaînes dépendantes de journaux affidés, propriétés idéologiques de quelques conseillers proches ou de quelques centres occultes de pouvoir qui lancent leurs chaînes à partir de l’étranger, avec la même culture «religieuse» pour masses imbéciles, même culte du rire bête et de l’inconscience et même conservatisme destiné à endormir les gens de la caverne, cela on le tolère et on le prépare et on le laisse se financer.
Peut-on en vouloir aux faux partis ou aux faux médias ? Un peu, si peu ou beaucoup. Il faut en vouloir directement aux vieillards, ceux qui croient fermer le ciel en fermant les yeux. Triste et ridicule posture de la préhistoire qui confond pagnes et pantalons. On croit que l’on interdit l’audiovisuel aux Algériens alors que les satellites existent, la télécommande existe, «zapper» est un verbe universel et les télés sont partout. On croit contrôler l’information alors qu’Internet existe et que les gens filment, disent, commentent et s’insurgent et s’informent ailleurs que chez Corée du Nord-TV. Le mensonge sur l’audiovisuel est un mensonge ridicule, le «champ» est déjà ouvert par le ciel et les plus malins au sein de ce régime y ont déjà creusé leur place avec l’argent trouble et les soutiens discrets.
Donc, une année après, réellement, le champ audiovisuel reste fermé. On en conclut que le pluralisme audiovisuel provoque encore une étrange gêne chez les régimes peu démocratiques. La raison ? Les putschistes prennent deux choses quand ils prennent le Pouvoir: le président déchu par les cheveux et la TV nationale par les chars. Ils peuvent rendre le premier au Pouvoir. Pour le second, c’est plus difficile.
En attendant ? En attendant l’ouverture du champ audiovisuel et la restitution de l’ENTV au peuple, on pourchasse des jeunes de 23 ans pour un avis mis en boucle sur le Net. Que dit le jeune Tarek emprisonné par la police du régime au procureur ? «Je ne voulais pas occuper la route, je ne voulais pas m’immoler par le feu. J’ai donné mon opinion sur les élections et je ne vais pas changer d’opinion». Admirable synthèse d’une époque à l’oreille d’une époque morte et sourde.
6 mai 2012
El -HOUARI Dilmi