Avant d’aborder la monographie de la commune indigène de Tiaret-Aflou, il nous a paru utile d’étudier les caractères des communes indigènes, leur organisation et leur fonctionnement. Ces unités administratives sont loin de ressembler aux communes métropolitaines ou algériennes du Tell ; créées pour des besoins spéciaux elles ont dû nécessairement comporter une organisation toute différente que celle qui régit les communes où l’élément européen est prépondérant.
Dans les communes algériennes régies par la loi municipale du 5 avril 1884-, les franchises et les libertés municipales sont absolument identiques à celles dont jouissent les habitants de la France continentale. Les légères exceptions prévues par la loi ont pour objet de tenir compte des besoins locaux et de donner aux populations indigènes le droit de désigner des représentants au sein du Conseil municipal pour soutenir et défendre leurs, intérêts.
Il est évident qu’il ne saurait en être de même dans les territoires qui composent les communes indigènes. Situées au Sud de l’Algérie, comportant de vastes espaces habités par des tribus généralement nomades, l’organisation municipale de ces communes ne pouvait ètre la même que pour leurs voisines du Tell.Il était indispensable que le pouvoir central puisse faire sentir son action et exercer sa surveillance sur des populations naguère hostiles, igonorantes des libertés communales et peu en mesure de gérer convenablement elles-mêmes les intérêts multiples de la collectivité.
Il fallait donc créer une administration paternelle, mais puissante pour maintenir dans le devoir et l’obéissance les sujets sous ses ordres.
C’est dans ce but que l’arrêté du 13 novembre 1873, qui a créé les communes indigènes, a confié à l’autorité militaire la direction, la gestion et la surveillance de ces unités administratives.
A la tête de la commune se trouve le Commandant supérieur qui remplit les fonctions de Maire et en exerce toutes les attributions. Sous ses ordres, au point de vue communal, sont placés les chefs des bureaux arabes chargés de la police des populations indigènes, de l’expédition des ordres, de leur mise à exécution, de la police des marchés, de la situation politique et administrative du pays, de la recherche des crimes et délits, etc.
Une Commission municipale, composée du commandant supérieur, du ou des capitaines, chefs des bureaux arabes, et des caïds est appelée par ses délibérations à se prononcer sur toutes les matières soumises aux conseils municipaux des communes de plein exercice. (Art. 11 de l’arrêté du 20 mai 1868.)
« Tandis que les communes mixtes civiles ou « militaires offrent les caractères d’une transition « progressive vers le régime du droit commun, le « trait essentiel des communes indigènes, est, ainsi « que l’exprime d’ailleurs l’arrêté du 13 novembre 1874, a en son article 3, d’être soumises au régime du « commandement. Mais elles ont d’ailleurs, aussi a bien que les communes mixtes et de plein exercice,
« la qualité de personnes civiles et exercent tous les « droits, prérogatives et actions qui y sont attachées. « Elles ont leur existence, leur domaine et leur organisation propres. » (Arrêté du 29 mai 1868, art. 4. Arrêté du 13 novembre 1874, art. 2.) .
Il résulte des principes énoncés ci-dessus que les communes indigènes en tant qu’unités territoriales ont un budget personnel, qu’elles peuvent posséder, vendre et acheter ; mais que leurs habitants, européens ou indigènes, n’ont aucune action à exercer, par la voie du vote, sur la composition de la commission administrative et la désignation des magistrats chargés d’en diriger les destinées.
Il n’existe donc pas en commune indigène des compétitions pour l’obtention des fonctions municipales. On n’y voit pas de luttes locales ni des çofs se disputer le pouvoir; l’exercice de ce dernier est entièrement entre les mains de l’autorité militaire qui peut ainsi diriger les populations sous ses ordres, les surveiller, les instruire et mener à bonne fin les travaux destinés à assurer le développement économique et industriel de ces régions, afin qu’elles puissent, dans un avenir plus ou moins éloigné, être appelées à jouir des bienfaits d’une organisation plus complète et comportant une plus grande liberté.
(1) Le régime municipal en Algérie, par René Tilloy, art. 198, p. 111.
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La commune indigène de Tiaret-Aflou a été créée par arrêté gouvernemental du 13 novembre 1874 et a commencé à fonctionner à partir du ler janvier 1875. Issue de l’ancienne commune subdivisionnaire de Mascara, ainsi que la commune indigène de la Yacoubia, elle a, elle-même, donné naissance en 1881 à la commune mixte civile de Tiaret, et en 1885. à une partie de la commune mixte de Frendah.
Sa division en deux cercles (Tiaret et Aflou) est la conséquence de l’application de l’article 2 de l’arrêté constitutif, qui prévoyait que certains cercles ou annexes, par suite de l’insuftisance de leurs ressources, ne pourraient être érigés immédiatement en communes indépendantes et devraient former provisoirement des sections de communes indigènes.
La commune indigène de Tiaret-Aflou, par application du principe qui précède, est donc divisée en deux cercles qui constituent l’unité communale représentée par un commandant supérieur en résidence à Tiaret.
Le siège de la commune indigène de Tiaret, comme celui de la commune mixte civile, se trouve donc situé hors de ses limites, sur le territoire de la commune de plein exercice de Tiaret. Il en résulte cette anomalie, que les ordonnateurs des communes indigène et mixte civile, chargés des intérêts d’unités territoriales très importantes, sont eux-mêmes administrés, en tant que simples citoyens et relèvent en cette qualité et comme contribuables, de l’arrondissement d’Oran dont fait partie la commune de plein exercice de Tiaret.
La commune indigène de Tiaret-Aflou, dans son ensemble, a la forme d’un triangle dont le sommet le plus aigu s’enfonce dans les régions sahariennes en pointe effilée, pendant que le côté opposé forme bordure sur l’immense plaine du Sersou. Sa limite Est se confond avec celles des départements d’Oran et d’Alger sur une longueur de près de 400 kilomètres; à l’Ouest, elle est limitée par les cercles de Géryville et de Saïda; au N.-Ouest, par la commune mixte civile de Frendah, et au Nord, par les communes mixtes de Tiaret et de Téniet-el-Hâad.
Cette immense bande de terre se développe donc du Sahara à la limite Sud du Tell et comporte des zones distinctes déterminées par les reliefs du sol qui la divisent en trois parties :
1° Le versant Nord qui envoie par le Chélifl et ses affluents, ses eaux à la Méditerranée ;
2° La région des Chotts, sorte de dépression intermédiaire où les eaux s’accumulent en daias et lacs ;
3° Enfin le versant Sud qui rejette vers les sables du désert les rivières nées des sources qui jaillissent des lianes méridionaux du djebel Amour.
L’ensemble des plaines a une altitude moyenne de 900 à 1,200 mètres; au-dessus s’élèvent les massifs du Nador (1,412), et du djebel Amour au Sud (1,907 mètres au ras Touïlet Makna)
Ces considérations générales achevées, nous passerons à l’examen plus détaillé de chaque cercle en reproduisant en grande partie la remarquable étude géographique faite par MM. les officiers des affaires indigènes et publiée par ordre de M. Cambon, gouverneur général de l’Algérie, sous le titre : Le Pays du Mouton.
Source Société de géographie et d’archéologie de la province d’Oran fondé en 1878
Bulletin TOME XXII- — 1902
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28 juillet 2012 à 23 11 38 07387
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