« Vous êtes venus chez nous alors que nous sommes le dernier mois des moissons, allez vérifier vous-mêmes les longues files d’attente d’agriculteurs qui se forment pour quémander des espaces pour stocker les rendements», lui a dit un intervenant. Les représentants de la daïra de Sougueur (à 25km du chef lieu Tiaret) ont été les plus prolifiques en revendications durant cette réunion. Ils ont interpellé le 1er ministre sur de nombreux problèmes (habitat, emploi, agriculture ).» Sougueur est une ville morte, » lui disent-ils. Mais selon des natifs de la région, Sougueur est la daïra qui fait le plus «de lobbying pour arracher le maximum de choses, cela ne veut pas dire qu’elle est déshéritée comme le prétendent ses représentants, bien au contraire. » Ces contrées de la wilaya de Tiaret, comme Frenda, Machraâ Essfa, Aïn Dheb, Rahouia et bien d’autres, sont bien assises historiquement et même politiquement puisqu’elles ont enfantés entre autres Larbi Belkheir, Abdelaziz Belklhadem, Abdelkader Hadjar, Zohra Drif Bittat et Kaid Ahmed (Commandant Slimane). Le 1er ministre a d’ailleurs pris le soin de lui rendre hommage ainsi qu’au député Boutouiga, décédé il y a quelques années. Il lancera ce pic aux intervenants qui n’arrêtaient pas de se plaindre que «Sougueur et Frenda ne sont pas délaissés, ne me posez pas de problèmes avec Belkhadem. »
Les agriculteurs lui proposent de faire construire des silos pour contenir les productions de blé à Sougueur, Machraâ Essfa et Rahouia. A défaut, c’est la production qui pourrit. «Honte à une nation qui mange ce qu’elle ne produit pas, » paraphrase l’un d’entre eux le poète.
«ON CREVE DE SOIF»
L’agriculteur rappelle au 1er ministre que «les silos ont été ou fermés ou détruits» et lui demande si «l’Etat ne peut pas en construire d’autres.» L’eau pose aussi problème dans la région. «On crève de soif,» lui dit un intervenant pour appuyer le projet de réalisation d’une usine de dessalement. La santé est le parent le plus pauvre de la société et du pays tout entier. Tiaret n’en fait pas exception. «Il y a des malades atteints de cancer qui sont obligés d’aller à l’hôpital d’Oran pour des séances de chimiothérapie mais ils ont des rendez-vous éloignés de 14 mois, pourquoi ne pas activer la construction du centre anti-cancer à Tiaret ?» interroge un représentant d’une association. Une série de problèmes sera ainsi exposée au 1er ministre. «Des écoles et des CEM seront transformés en lycées, mais où vont aller les élèves ?» ; «On n’a pas d’électricité dans certains quartiers» ; «La prison de Tiaret a été agrandie et la raffinerie n’a pas encore été construite alors qu’elle est programmée depuis longtemps» ; «Le pré-emploi ne va pas nous emmener loin, c’est beaucoup d’argent mais ça ne garantit pas de postes, nous voulons des emplois d’avenir» ; et autres griefs retenus contre les autorités locales. «Tiaret a un million d’hectares de steppe, 47% sont des sols dégradés selon les études du satellite d’Oran, et ce à cause des labours illicites et des surpâturages, » lui fait savoir un représentant d’une association de protection de l’environnement. « Les bénéficiaires des terres les ont louées à des milliards, on demande un organisme pour les protéger, » revendique-t-il. Cet intervenant pense que « c’est bien de construire une raffinerie mais il faut avoir des unités tout autour pour protéger l’environnement. » Certains dénoncent l’état délabré des routes et demandent l’ouverture de parcours agricoles. Nombreux sont les Tiaretis qui ont demandé au 1er ministre d’intervenir pour faire ouvrir la fameuse société publique de textiles Sonitex fermée comme tant d’autres au nom de stupides programmes d’ajustements structurels imposés par le FMI durant les années 90 à un gouvernement en mal de gestion, d’idées, de compétences et de courage politique. Bien qu’elle a été agrandie et a bénéficié d’un grand nombre de constructions nouvelles, Tiaret a, comme beaucoup de villes du pays, un tissu urbain qui manque atrocement d’harmonie et se délabre au fil du temps.
«VOUS ETES SYMPATHIQUE, M. LE 1ER MINISTRE»
« Arrêtez le copier-coller des schémas d’autres régions, il faut faire des études pour procéder à la réhabilitation du tissu urbain de Tiaret selon ses spécificités, » a demandé un architecte. « Il n’y a pas de partenariat, ni local ni étranger, la Sonitex a été une grande entreprise, il faut la réhabiliter et la relancer pour créer de l’emploi dans la région, » est-il demandé avec insistance à Sellal. « L’Algérie est le seul pays où la société civile n’est pas génératrice d’emplois, les lois doivent changer pour que les associations participent dans la création d’emploi et n’attendent pas que les subventions de l’Etat,» lui suggère un représentant d’une association. Celui des consommateurs réagira pour revendiquer des lieux de loisirs «parce que Tiaret en manque beaucoup.» Un ancien imam posera au 1er ministre le problème de la saisie par les douanes d’Oran de son fusil de chasse qu’il a ramené de France en janvier 2003. «Je cours et j’écris à tout le monde depuis 10 ans mais personne n’a voulu m’aider à récupérer mon bine,» s’est plaint l’intéressé avec dossier en main. «N’écris plus à personne, écris au wali et je te dirai quoi faire,» lui a tout de suite répondu Sellal.
Le dernier intervenant attirera l’attention sur la non pérennisation de personnels éducatifs au niveau des écoles. Et c’est par un «je suis content de vous voir 1er ministre parce que vous êtes sympathique,» d’un intervenant que les débats avec la société civile se sont achevés vers 18h 30. C’était dans l’après-midi du jeudi dernier qui affichait «allègrement» 42 degrés à l’ombre. Tiaret, la capitale des Hauts-Plateaux, cette région chargée d’histoire et de culture, avait convié ses invités à une excellente hrira durant un ftour qui a été agrémenté par des morceaux de musique andalouse bien du terroir.
3 août 2013
AGRICULTURE, Quotidien D-Oran (Le )